Ouverture 3
			Deux raisons ont présidé au choix du studiolo d'Urbino comme architecture de départ et donc comme base de transposition. La première concerne deux traits fondamentaux de l'architecture d'arrivée (c'est-à-dire du résultat projeté de la transposition), la connaissance disciplinaire et l'individualité, qui caractérisent également l'architecture de départ. L'architecture d'arrivée, appelée 'Collegium', est en effet conçue en analogie à une agglomération universitaire dont les édifices sont consacrés à des disciplines ou à des groupes de disciplines spécifiques. Il s'agit cependant ici d'un modèle de référence plutôt que d'une application puisque, d'une manière apparentée au caractère figuré plutôt que littéral du studiolo d'Urbino, Collegium est une architecture abstraite et non pas physique. En outre, elle s'écarte du modèle de référence en ce que les regroupements qu'elle effectue (les 'configurations', comme nous le verrons plus loin) ne correspondent pas aux disciplines universitaires telles que nous les définissons, mais relèvent plutôt d'une problématique qui, au-delà de l'interdisciplinarité, cherche à introduire des liaisons extra-disciplinaires entre des corps ou des membres théoriques nés dans l'enceinte de disciplines déterminées. Ces liaisons sont d'ordre singulier ou idiosyncratique, c'est-à-dire qu'elles relèvent d'une problématique individuelle, faisant écho en cela à l'individualité du prince humaniste de la Renaissance. L'individualité contemporaine diffère cependant de celle de ce prince en ce qu'elle n'est pas exemplaire ou, si elle l'est, ce n'est pas d'une organisation des connaissances valable universellement, mais plutôt d'une condition de connaissance dans laquelle l'invention théorique est principale et s'alimente à un fonds d'idées dont il semble que la productivité soit proportionnelle à la variété des sources disciplinaires et, par conséquent, à la liberté prise relativement aux contraintes exercées normalement par ces dernières. Peut-être s'agit-il d'une situation transitoire entre une organisation disciplinaire et une structure ultérieure qui en reprendra le caractère d'universalité. Ce n'est toutefois pas le propos ici de spéculer sur cette question.